Honte à tous musulmans qui ont laissé la Libye tomber entre les mains de la barbarie impérialiste.

UN RÉSISTANT ANTI-MAÇONNIQUE ET ANTI-MONDIALISTE.

jeudi 13 octobre 2011

Libye : de nombreuses tensions au sein du CNT

13 octobre 2011

Libye : de nombreuses tensions au sein du CNT

libye,cnt,kadhafi,moustafa abdel jalil,benghazi,otan,anders fogh rasmussenDepuis plusieurs semaines, les grands principes du programme du CNT sont détaillés par les responsables du mouvement : la Charia va servir de base au nouveau droit libyen et le politique et le religieux ne seront pas séparés, n’en déplaise à Bernard-Henri Lévy qui affirmait le 24 mars 2011 au journal Le Monde : "Le Conseil national de transition (CNT) veut une Libye laïque".
Le CNT reste ainsi fidèle à sa ligne politique énoncée en août dernier dans une ébauche de Constitution : "Tripoli est la capitale, l'Islam est la religion, la Charia islamique est la source principale de la législation". La majorité des libyens étant très religieuse et conservatrice, la position de Moustafa Abdel Jalil, président du CNT, semble en fait être une position médiane visant à ménager les occidentaux tout en canalisant le pouvoir grandissant d'autres islamistes plus radicaux.
Ancien juriste en Charia et ministre de la justice, Abdel Jalil commence pourtant déjà à être contesté par nombre de ses alliés, dont certains voient en lui un laïc. Deux tendances et deux légitimités s'affrontent au sein du CNT.
D'un côté, les combattants militaires issus des milices indépendantes (ou "katibas"), menés notamment par Ismaïl Sallabi et Abdelhakim Belhadj, opposants historiques au colonel Kadhafi, et de l'autre, les politiques, comme Abdel Jalil, soutenus par les occidentaux tout en étant, pour beaucoup, des anciens du régime de Kadhafi. Le fait que les fondamentalistes soient également les chefs militaires soutenus par les services secrets du Qatar, apparaît comme une bombe à retardement, car, s'ils ne désarment pas, le risque est grand de voir les dissensions au sein du CNT s'exacerber et dégénérer en une possible guerre civile.
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Abdelhakim Belhadj, l'un des chefs militaires rebelles et à présent gouverneur militaire élu de Tripoli, est en effet bien connu des services secrets américains. Belhadj est l'un des fondateurs et le chef du Groupe Islamique Combattant (GIC), groupuscule djihadiste ayant eu, avant le 11 septembre, des camps d'entraînement en Afghanistan. Ironie de l'histoire, Belhadj, héros de la libération de Tripoli, avait été, il y a quelques années, arrêté et livré au colonel Kadhafi par la CIA et le MI-6.
Ismaïl Sallabi, libérateur autoproclamé de Benghazi, est un autre extrémiste également héros de la révolution. Le chef de la Brigade des martyrs du 17 février, héritière du Groupe de Combat Islamique Libyen, ayant combattu Kadhafi pendant de longues années, a appelé les principaux dirigeants du CNT à démissionner, accusant ses dirigeants d'être "réminiscences de l'ère Kadhafi et des progressistes". Loin d’être un simple combattant, Sallabi peut aussi se montrer diplomate : ainsi, il a rapidement obtenu dès le 20 février le soutien de deux tribus touaregs et surtout celui d'une grande partie des Warfala, la plus grande tribu de Libye, pays tribal par excellence.
Beaucoup s’accordent à dire le ralliement des tribus Warfala, Zaouya, Touareg et Toubou a été l’élément déterminant précipitant la chute de Kadhafi, les berbères ouvrant un front à l’ouest et les Toubou dans la région désertique du Fezzan, pièce maîtresse dans le dispositif de Kadhafi et principale ligne logistique reliant Tripoli aux frontières du sud-ouest.
Ces fondamentalistes sont forts d'une légitimité militaire certaine et entendent la faire valoir. Ils sont les libérateurs de Tripoli et de Benghazi et affirment même avoir pris le CNT et l'OTAN par surprise.
En effet, l'assassinat du général Younes le 27 juillet, chargé au CNT d’unifier les différentes unités, a précédé les offensives des hommes de Sallabi et de Belhadj. Selon son neveu, Hisham al-Obaïdi, les assassins de Younes se trouvent dans les rangs de la Brigade des martyrs du 17 février. Le général avait en effet entamé des négociations avec le colonel Kadhafi visant à geler le conflit et engager une transition, ce que n'auraient apprécié les membres de cette milice.
Il faut se souvenir qu'aussi bien les dirigeants du CNT que l'OTAN ont, pendant un long moment, été ouverts à une solution politique au conflit libyen et à la négociation avec Kadhafi. Le secrétaire général de l'OTAN Anders Fogh Rasmussen déclarait le 13 avril qu'il n'y avait pas de solution militaire au conflit libyen. Le 15 août, Dominique de Villepin, accompagné par Alexandre Djouhri, connu pour avoir ses entrées à Tripoli, faisait dans la diplomatie parallèle à Djerba en rencontrant Béchir Ben Salah, directeur de cabinet de Kadhafi.
Autre diplomate parallèle, David Welch, ancien membre de l'administration Bush, a rencontré un proche de Kadhafi 3 semaines avant la chute de Tripoli à l'hôtel Four Seasons du Caire. De tels rencontres n'ont pu se dérouler sans l'agrément des services secrets. Il est probable que les kadhafistes, aidés par les services secrets occidentaux, aient cherché à négocier avec les "modérés" du CNT et à éliminer les fondamentalistes, dans une logique de "containment". L'assassinat du général Younes et les offensives militaires, notamment de la Brigade des martyrs du 17 février, ont apparemment mis à mal ce plan. A présent, le CNT promet d’exploser à moyen terme et les occidentaux devraient suivre attentivement les tensions internes au sein du mouvement, devenu coquille vide, et le futur des différentes milices le composant.
Les exemples tunisien et égyptien montrent que, face aux révolutions arabes, les occidentaux souhaitent une rupture relative et privilégient souvent des recyclages des régimes précédents afin de contenir les fondamentalistes. Le CNT, à la durée de vie temporaire, et la Libye n'échapperont pas à la règle.
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Une version longue de cet article a été publiée sur SlateAfrique le 13 octobre 2011.

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